Prix de thèse de la MMSH 2024 : Les ONG musulmanes en France

Le prix de thèse de la MMSH pour l’année 2024 est attribué à Lucas Faure pour sa thèse intitulée Gouverner le social par le religieux : les ONG humanitaires musulmanes en France.

Dessin de mains tendues. Les mains sont colorées en mosaïque de couleur bleu, rose, vert, orange et bordeau
Tim Mossholder, unsplash licence

Résumé

Originaires du Royaume-Uni, les ONG musulmanes apparaissent en France dans les années 1990. Le Secours islamique France, Human Appeal, Muslim Hands, Ummah Charity, Syria Charity, Au Cœur de la Précarité ou LIFE font partie des associations emblématiques. Depuis les années 2010, les ONG humanitaires musulmanes s’affirment comme les acteurs les plus dynamiques du champ associatif islamique, au point de devenir pour certaines des partenaires durables des pouvoirs publics. Présentes dans les grandes villes françaises, elles s’insèrent dans des réseaux locaux de solidarité à travers différentes activités (distributions alimentaires, maraudes, hébergement d’urgence, soutien scolaire, accompagnement administratif, etc.), tout en menant des programmes humanitaires à l’international. Ces associations développent également des actions de plaidoyer, prennent la parole sur des sujets politiques et médiatiques, voire dénoncent les rapports de domination Nord/Sud ou les inégalités sociales en France.

Par son approche à la fois sociohistorique et ethnographique, la thèse apporte un éclairage inédit sur l’humanitaire islamique en France, dans un environnement sécularisé, minoritaire et concurrentiel marqué par l’interventionnisme étatique. À rebours de la rhétorique républicaine qui stigmatise les confessionnalismes, l’État délègue aux ONG musulmanes une gestion particulariste des publics musulmans. À la reconnaissance au nom d’une utilité confessionnelle, répond une stigmatisation confessionnelle qui place les ONG humanitaires musulmanes dans une relation de subordination utile vis-à-vis de l’État. Une injonction paradoxale est alors adressée aux musulmans, puisqu’il leur faut être « musulmans mais pas trop ! ». Le paradoxe de la stigmatisation d’acteurs associatifs, pourtant indispensables au gouvernement du social par le religieux, est ainsi au cœur de l’étude.

Biographie 

Lucas Faure est docteur en science politique (Sciences Po Aix, AMU, CNRS, Mesopolhis UMR 7064). Sa thèse soutenue en 2023 porte sur l’humanitaire islamique et les formes associatives qu’il revêt dans le contexte français marqué par une défiance vis-à-vis des groupes religieux minoritaires. Durant 4 ans, Lucas Faure a entrepris un travail ethnographique pour devenir membre à part entière de ces associations et donner à voir au concret leurs activités, rompant ainsi avec le sens commun associé à cet objet. Son travail se positionne à la confluence de deux grands enjeux pluridisciplinaires : d’un côté l’étude des rapports au politique d’un groupe minoritaire issu d’un parcours migratoire, d’un autre côté l’analyse des mutations du monde associatif à l’aune de ses relations avec les pouvoirs publics. Lucas Faure poursuit ces questionnements dans le cadre d’une recherche postdoctorale portant sur l’islam et l’écologie à l’Université Libre de Bruxelles (Germe).

Prix de thèse de la MMSH

Depuis 2019, la Maison méditerranéenne des sciences de l’homme a institué un prix de thèse visant à récompenser les auteurs ou autrices des travaux les plus prometteurs sur les études méditerranéennes et africaines en sciences humaines et sociales. Ce prix d’un montant de 3 000 euros est destiné à la publication de la thèse, dans l’une des collections de la MMSH ou de ses partenaires.

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